Ugolin et ses fils dans un souterrain Jean-Baptiste CarpeauxValenciennes, 1827 – Courbevoie, 1875Vers 1856-1857Plume et encre brune sur traitsde graphite sur papier bleuH. 0,14 ; L.,0214S.b.d. : JBte CarpeauxInv. CD 115 Lorsque Carpeaux décide de consacrer son envoi romain de dernière année à la terrible légende d’Ugolin, le sculpteur fait preuve d’une grande audace et d’une belle originalité, car peu d’exemples sont alors recensés dans la sculpture moderne. En revanche, le thème avait été abondamment traité en peinture et en gravure, ce qui explique peut-être que ses premières réflexions l’aient orienté vers un traitement en bas-relief plutôt qu’en ronde-bosse. Ces précoces esquisses, avec une composition en lunette, s’avèrent notamment proches d’une gravure de John Flaxman montrant Ugolin rampant sur le corps de ses enfants dans un souterrain. Carpeaux avait sans doute connaissance de cette interprétation, puisque la bibliothèque de la villa Médicis conservait un recueil de la Divine Comédie illustrée par Flaxman et emprunté par l’ami du sculpteur, Joseph Soumy, en juin 1856. C’est donc entre cette date et décembre 1857, alors que Carpeaux, dans une lettre, compare son Ugolin au groupe du Laocoon, qu’il faut situer ce dessin représentant Ugolin rampant. L’étroite imbrication des corps, qui caractérise le groupe final, est déjà présente dans ce croquis sur papier bleu où Ugolin semble scruter les derniers signes de vie de ses enfants. Son visage exprimant l’effroi face à la mort et à la faim, est particulièrement saisissant, de même que ses mains crochues tâtonnant avidement dans l’obscurité. Dès les prémices, Carpeaux perçoit intimement la tragédie de ce sujet et s’oriente vers une interprétation puissante et douloureuse, qui se confondra d’ailleurs avec sa propre existence tout au long de la réalisation de cette oeuvre.